LIEU : Montbrun-les-Bains et ailleurs si vous êtes partant-e-s!
Depuis des années, les habitants de Montbrun-les-Bains et de ses alentours se réunissent le mardi soir pour danser. A chaque soirée est convié un professeur différent, transmettant sa passion : danse biodynamique, contact improvisation, chant spontané et danse, etc... L'ambiance y est tellement chaleureuse! D'année en année, on peut dire que la salle ne désemplit pas! Il s'agit d'une véritable petite tribu locale de danseurs libres et sensibles. J'en ai fait partie pendant quelques mémorables soirées.
Un jour, les organisatrices m'ont invitée à leur proposer un cours. J'ai donc imaginé un format sur-mesure : un atelier d'anti-chorégraphie pour libres-danseurs.
Afin d'embrasser cet enjeu en me sentant des bases solides, j'ai rassemblé dans un manuel (voir ci-dessous) des exercices tirés de mes formations auprès de chorégraphes mais aussi tirés de mon observation de chorégraphies et de pièces de théâtre physique. Enfin, il m'arrive, en écoutant de le musique, de voir instantanément la chorégraphie ou, du moins, d'en pressentir la partition correspondante. J'essaie alors de traduire cette vision en invitations à composer.
Le tac de Tac O Tac, c'est de prendre la balle au rebonds, le drôle au sérieux et tes jambes à ton cou.
Le hic de Tac O Tac, c'est d'improviser avec un minimum de règles plus ou moins variables, plus ou moins tordues.
Le top de Tac O Tac, c'est quand chaque danse prend part à chaque danse et l'improvisation devient collective.
Le
plus de Tac O Tac, c'est la musique : danser avec elle, sur
elle, contre elle et tout contre elle.
Inspirée par mes expériences en composition instantanée, je vous propose un trip ininterrompu, haletant et ludique où le lexique chorégraphique de chacun s'accroît au gré des propositions. De quoi bien échauffer les pattes, le cœur et les antennes pour une danse de plus en plus libre car bien outillée!
Musiques douces et amples : « For Bunita Marcus », Morton Feldman [6 :07],
Musiques challenge: “Farther and Fainter”, John Tejada [6:19],
Ma marche est ma danse. Méditation de chaque partie du corps. Quels engagements ? Quelles décisions ? Quelles orientations ?
Savoir faire une pause. Reprendre dans une même direction ou changer ?
Est-ce que la respiration est toujours présente ?
Peut-on y ajouter un regard sur quelqu’un ici présent ?
Avec la musique : la marche avec ou contre la musique ? Apprentissage des contrastes. Utiliser sa respiration pour maintenir l’énergie. Respirer est un acte de responsabilité du danseur.
“Futo”, Shida Shahabi [6:48], « Ode to the Big Sea”, The Cinematic Orchestra [5:39], “At the end of it all”, N.I.N. [?]
Les cercles et les spirales sont partout dans le corps et dans l'espace.
1. Pour cet exercice, je vous invite à rester attentif à votre respiration et à faire des pauses pour ne pas surchauffer.
2. Nous tournons la tête, détournons les yeux, tournons les poignets, les coudes, les bras, les épaules, les vertèbres dorsales, lombaires, les hanches. Nous dessinons des cercles avec le coccyx ou notre queue d'ancien singe.
3. Nous twistons les hanches, nous tournons les genoux, nous pivotons sur les pointes ou les talons. Comment le bas du corps éprouve-t-il les cercles et les spirales ?
4. Parfois, les cercles sont des demi-cercles. Explorez !
5. Parfois on ne tourne que dans un sens et jamais dans un autre sens. Pourquoi ? Explorez les cercles oubliés cette question avec les parties du corps qui vous conviennent.
6. Si on va jusqu'au bout d'une rotation de la main ou du pied, cela peut entraîner tout le corps. Idem pour toutes les autres parties du corps : partez d'un point de votre corps et laisser la rotation cheminer et vous entraîner. Vous pouvez vous retrouver à terre, de cette manière.
7. Les spirales et cercles sont directement connectés à de nombreuses fonctions de nos organes, dont le foie. Ce foie m'invite à vous demander d'ouvrir les yeux ou de les fermer pour tester la différence.
8. Laissez la rotation et la spirale ordonner toute l'organisation de votre corps dans l'espace et respirez.
9. Pouvez-vous improviser un solo à partir de ce que vous venez de découvrir ? Aller au plus simple : le point de départ de la rotation est bien clair et bien visible pour le public.
« Swallow’s Tempest », Gigi Masin [6 :58]
• Les mouvements peuvent être élaborés selon leur amplitude. Nous parlerons de format S/M/J/XL comme pour les vêtements.
• Marchez dans l'espace le plus banalement possible. A mon signal appliquez le format demandé : S/M/... en silence. Puis avec musique : « Syncline », Andrea Belfi [7 :40]
• Elaborez un mouvement simple. Répétez-le. Mémorisez-le.
• Tester sa version Small, M, L XL... Répétez plusieurs fois chaque format.
• A mon signal appliquez le format demandé : S/M/...
• Je vais remettre de la musique. Soit, vous décidez de garder le même mouvement, soit vous décidez d'élaborer de nouveaux mouvements. Quoiqu'il en soit, je ne vous dicte plus les formats. C'est à vous de les décidez. « Jin », Martin Kohlstedt [3 :52]
Engagez-vous dans un solo de mouvements exclusivement distaux
Idem : exclusivement proximaux
Convenez avec vous-même d'une courte combinaison. Par exemple : PPD ou DPD ou PDP...
Jouez-la en boucle.
Variez les format S/M/L/XL
Chacun va montrer sa combinaison et nous l'apprendre.
Nous enchaînerons ensuite toutes les combinaisons dans leur format M
Avec tout ce que nous venons d'étudier précédemment, je vous invite à présent à varier la vitesse. Sur le morceau suivant, votre solo présentera 3 moments d'accélération et 3 moments de quasi-immobilité. Ahull, Loscill [6:38]
• Qu'avez-vous observé ?
• A partir de quoi ou de quand avez-vous accéléré ? Et ralenti ?
• Il n'est pas nécessaire d'être progressif entre la rapidité et la lenteur. Il est possible aussi de se figer.
• Réessayons : Peace Piece, Bill EVANS
Pas à réaliser d’un angle à l’autre d’un carré imaginaire
· Orienter les pas
· Je goûte à ce déplacement
· Les bras sont « neutres »
· Quelle musique
o dans ma respiration,
o entre ma respiration et mes pas,
o dans mes pas uniquement,
o dans le mouvement de mon regard
· Rétrécir le carré
· Agrandir le carré
· Glisser, sauter,
· Variez la vitesse d’exécution
· Je sais d’où je viens – je sais vers où je vais
· Est-ce que je regarde toujours dans la direction où je vais ?
· Est-ce que je peux rendre tout cela plus clair ?
Marchez librement dans l'espace. C'est un déplacement debout. Vous êtes des êtres verticaux en déplacement.
Occupez cet espace pleinement. Sans empressement. L'espace est un plan horizontal. Vous, vous êtes les êtres verticaux. Vous traversez cet espace. Vous révélez cet espace.
Vous croisez d'autres danseurs, c'est normal : vous n'êtes pas seul.
Vos regards se croisent. Ralentissez mais marchez toujours. Juste croisez vos regards.
• Parfois, il faut lever un peu les yeux pour regarder quelqu'un dans les yeux.
• Parfois, il faut baisser un peu le regard pour regarder quelqu'un dans les yeux. Observez ces lignes du regard.
• Détendez vos yeux. Décrispez vos joues. Ouvrez votre front. Dans la détente de votre peau, il est possible de sentir le vent de votre déplacement
A présent, maintenez la rencontre en marchant ensemble.
Focus sur le centre de votre corps, un peu en dessous du nombril. Pouvez-vous marcher avec cette personne en gardant le focus sur votre centre ? Essayez.
Marchez dans l'espace. Quand vous rencontrez quelqu'un, marchez ensemble.
A un certain moment, vous allez, sans parler, vous allonger au sol. Ensemble.
Vous allez rester un moment allongé, à deux.
Puis, à un certain moment, vous aller vous relever et reprendre votre marche.
Focus :
• Notez le rôle des yeux.
• Notez les tensions dans le visage ou aileurs.
• Notez votre centre.
Idem Carrés de Pas mais avec une sensibilité pour les autres carrés :
(a) Démarrer individuellement
(b) Se laisser influencer par un autre carré
(c) Est-ce que je peux deviner qui est influencé par ma danse de carré ?
(d) Connexion visuelle
(e) Quel accord possible ?
(f) Quelles redondances dans nos danses partagées ?
(g) Une phrase se construit
(h) Pouvons-nous la répéter ?
(i) Que répétons-nous ?
o Le mouvement ?
o La direction ?
o L’esprit ?
o Le rythme ?
o La texture ?
o L’amplitude ?
(j) Les uns après les autres et face au reste des participants, les duos ou trios formés sont invités à présenter leur danse partagée
“Proverb”, Steve Reich [14 :09], “Pelican Narrows”, Caribou [3:50], “Anna & Nina”, Caribou [5:40]
John Coltrane Interview – by Carl-Erik Lindgren
Nous sommes dans une émission radiophonique. Il y a un interviewer et un interviewé.
« -Bonjour
-Bonjour
-Merci de nous avoir rejoint pour cette émission
-De rien, c'est un plaisir
-Comment votre carrière a-t-elle débuté ?
-Oh, c'était il y a longtemps..
-Intéressant, blablabla, mais ... blablabla ?
-Parfaitement ! Blablabla...
Etc... »
Nous sommes dans un studio de danse. Tous les danseurs sont sourds et muet. Mais ils peuvent se mouvoir et se comprendre par le mouvement. A vous de jouer.
Règles du jeu : L'intention est de former un trio
a. Deux partenaires seront toujours en contact toucher tandis que le troisième reste au dehors. Il danse en s’inspirant de ce qu’il voit/comprend du duo
b. Le public est invité à s'interroger : A partir de quand un trio émerge vraiment ?
Processus :
1. Commencez donc une improvisation sans musique en duo. Le troisième danseur reste en coulisse. Prenez le temps de construire ce duo. C'est une relation, une histoire ou une certaine qualité de mouvement.
2. Quand la musique arrive, maintenez votre qualité de duo.
3. Le troisième danseur Yesterday is Here, Dans Dans
a. va rentrer dans l'espace, proche mais aussi à distance commode du duo. Il observe discrètement le duo avec ses yeux pendant un petit temps.
b. il va ressentir ce duo jusque dans son corps et sentir les endroits précis où son corps reçoit ce duo.
c. Il va utiliser son corps, tout pétris du duo en présence, pour illustrer ou répondre au duo. Le duo se poursuit sans faire attention à lui
d. Soudain, un des partenaires du duo va plonger son regard dans celui du troisième danseur.
e. A partir de là, tout est possible.
f. Trouvez une fin
Le groupe forme une ligne le long du fond de la scène. Cette ligne est importante. Il ne faut pas s'en détacher.
A un moment, cette ligne va s'avancer doucement et à la même vitesse vers le public. Concrètement, il s'agit d'une marche. Aucun mouvement ne vient parasiter la forme générale de cette marche. Les bras sont donc neutres. Le visage aussi. Les sens sont, par contre, très alertes.
A un moment, l’ensemble du groupe s'arrêtera. Puis, après un certain temps, tous les danseurs vont amorcer une descente vers le sol. Tous en même temps.
Enfin il vont s 'allonger, un certain temps.
A un moment, le groupe entier va sortir de sa position au sol pour se remettre debout.
A un moment, il va reprendre sa marche... en arrière.. et rejoindre le fond de la scène.
C'est une chorégraphie plus compliquée qu'elle n'en a l'air car je vous demande de la réaliser en 4 minutes. Pour la première expérience, je vous avertirai de chaque minute écoulée.
Cet exercice peut varier :
– la ligne descend, sauf un danseur qui reste debout
– la ligne garde en tête la même chorégraphie initiale mais un à un les danseurs prennent une décision : accélérer ou décélérer, prendre un partenaire par la main ou se désengager complètement de la chorégraphie (à vous de voir ce que désengagement signifie).
Groupe 1 : Joy of Brass – Phil France 3:53
Groupe 2 : Gymnopedie N°1 – Akira Rabelais
Les musiques sont aidantes mais peuvet aussi être surprenantes. Maintenez au maximum votre alignement sur le groupe. Si vous ne maintenez pas cet alignement, prenez la responsabilité de développer autre chose. Voyez si cette émancipation vaut la peine. Voyez si elle est possible en solo.
Musiques challengeantes :
Groupe 1 : Dissolve – Emptyset 2:50
Groupe 2 : Two Dots – Lusine 4:38
Le groupe part derrière la ligne de départ. Chacun élabore et répète un mouvement clair. Sans se regarder. A la ligne d’arrivée tout le groupe effectue le même mouvement. Lequel ? C’est ça qu’il faudra sentir.
Expérience 1 : sans musique
Expérience 2 : avec musique au départ (observer un temps assez long d'immobilité avant de vous mettre en mouvement)
Expérience 3 : avec musique qui survient au cours du process
Il se peut que de la musique soit présente… Gardez l’attention sur le mouvement en train de se construire. N’ajoutez rien. La musique est juste présente comme un témoin.
Kodomotachi, Susumu Yokota
Every Disguise - Lusine [4 :13]
Il s’agit de former un groupe compact immobile. L’enjeu est l’écoute du mouvement. C’est du tuning. On s’accorde tous ensemble. On ne forme qu’un. Les mouvements autorisés : tous ceux qui peuvent partir du haut du corps (de la taille à la tête en passant par les bras).
· L’un des danseurs à l’avant du groupe va entamer un mouvement. Un mouvement terriblement simple, basique. Ne cherchez pas à être intéressant ou blagueur. C’est un simple mouvement. Une fois celui-ci entamé, tous les autres membres du groupe le suivent en le reproduisant à la perfection. L’initiateur du mouvement sent si le groupe est avec lui et attend que tous soient à l’unisson avant de proposer un autre mouvement.
· L’initiative du mouvement va se faire à l’arrière du groupe. Même processus. L’initiateur est responsable de son influence et ne passe pas à un autre mouvement tant qu’il n’y a pas unisson.
· Un mouvement va démarrer quelque part dans le groupe. Unisson. Un autre mouvement va suivre mais ailleurs dans le groupe. Unisson. Ainsi de suite…
· Les trois exercices vont être abordés avec autorisation de bouger toutes les parties du corps. Le groupe reste néanmoins à sa place.
· Les trois premiers exercices vont être reproduits avec pour seul mouvement un déplacement dans l’espace. Il s’agit d’une marche. La rapidité de cette marche peut évoluer.
· Idem mais le groupe se déplace en marchant et peut ajouter des mouvements ou des textures
“?”, Mark Pritchard [6:03], “Spectacle of Ritual”, Kali Malone [10:53],
Pas plus de deux danseurs au milieu du cercle. Dès que l’un quitte, un autre rentre.
L’improvisation peut être comme une tempête et faire perdre la présence. Dans la tempête, restez avec le vent : votre respiration. Avec elle, consolidez le tempo, le vôtre.
Ceci est un jeu où votre respiration, votre concentration et votre présence ne font qu'un. Vous maintenez un tempo personnel en tant que tout premier danseur dans le cercle.
Chaque danseur qui entre dans le cercle récolte le tempo du précédent. Il le maintient un moment puis entre dans son propre tempo. Cela doit être clair pour tous. SI vous perdez le tempo ou la respiration. Immobilisez-vous, reprenez votre respiration, laissez le tempo revenir au fur et à mesure que vous vous remettez en mouvement.
Les danseurs sur le cercle suivent le tempo du centre du cercle.
N.B. : Dire les règles une première fois avant et les dire ensuite tout au long du process.
Round Robin, Jeu de relais en trio. Dès qu’un danseur retourne à sa place, un autre entre à l’intérieur.
1. Former un cercle, rester debout, présent
2. Jamais moins ni plus de 3 personnes danseront à l’intérieur du cercle
3. 1 danseur va entrer et démarrer un solo
4. Un 2ème danseur le rejoint
5. Un 3ème danseur les rejoint
6. Les membres du cercle observent activement et peuvent se déplacer sur les contours du cercle pour observer sous un autre angle. Les observateurs sont des caméras. Vous cherchez à obtenir la meilleure image.
7. Quand le premier danseur le sent, il achève sa danse et devient observateur. Au même moment, un observateur va rejoindre la danse.
8. Trouvez une fin (plus qu’une minute)
9. Nouvelle Musique / Nouvelle règle:
Ø La limite de trois danseurs n’est plus à respecter :
· Il peut y avoir beaucoup plus de danseurs
· Il peut y avoir moins de danseurs
· Il peut n’y avoir plus personne
Ø Vous pouvez rentrer dans le cercle en invitant, sans un mot, une autre personne.
Noon Hill Wood, Richard Skelton; Moiré, Jan Jelinek; “Improvisation #5”, Jon Abercrombie [10:17]
1. Trois danseurs démarrent ensemble en contact. Ils peuvent se toucher. Ce n’est pas une obligation pour autant.
2. Cependant, ils doivent toujours se voir.
3. Ils pivotent sur eux-mêmes et autour des autres membres du trio
4. Au cours de la danse, l’un d’entre eux se détache. Cette décision se prend sans un mot.
5. Le danseur détaché embrasse l’univers dans un solo. Il ventile le trio en se détachant et en jouant une sorte de contrepoint.
6. Les regards sont maintenus.
7. Les trois danseurs se touchent de nouveau dans leur danse.
8. Ils se retrouvent dans une danse.
9. S’étaient-ils quittés ?
10. Le trio se sépare de nouveau d’un danseur, le même que précédemment ou un nouveau.
Prérequis : Unisson (le banc de poissons). La différence avec l’exercice « Trio ventilé » est le nombre et l’absence d’exigence concernant le toucher et le contact visuel.
Le groupe compacte immobile démarre ensemble grâce à un mouvement initié par l’un des membres du groupe. Après un certain temps d’unisson, un danseur va se détacher du groupe et produire un solo. Durant ce solo, le groupe peut se déplacer et s’ancrer dans un autre point de l’espace. Quand le soliste s’immobilise.
« Voice in headphones », Mount Eerie [2:27], “Dundas, Ontario”, Caribou [?], “Bees”, Caribou [5:23], “Odessa”, Caribou [5:15]
Les propositions de ce recueil s’effectuent de préférence en silence puis, si cela est nécessaire ou sympathique, avec de la musique.
Avec, sur, contre la musique ? C’est tout l’enjeu de la composition. Quand on débute en improvisation, la tendance est de suivre ou de s’abandonner à la musique. La musique permettra à certains de produire plus facilement leurs mouvements. Il s’agit d’un support, parfois d’une dépendance. Peu importe : l’important est d’avoir conscience de cette relation et de l’utiliser pour composer de la danse.
Plus les techniques d'improvisation et de composition sont intégrées à la pratique du danseur, plus il apparaît que seul le corps dans l'espace et dans le temps suffit à constituer le rythme, la mélodie, le contrepoint ou le crescendo.
Si cela fait partie du projet de la composition, comment faire face à la musique ?
Dans ses premières œuvres chorégraphiques, Trisha Brown a principalement travaillé sans musique. Se confrontant progressivement à la musique, notamment celle de J.S. Bach, elle confie : « La musique est si envahissante que même si vous ne voulez pas marcher sur le temps, vous devez mettre le pied par terre et il y a forcément un temps à ce moment-là ! Vous ne pouvez pas marcher dessus. Et c'est un problème très intéressant »[1].
Aussi, sur le plan de la composition d'un thème principal, la danse n'a pas la puissance de la musique. En effet, « comment créer un motif de vingt comptes qui soit la genèse de 25 minutes de mouvement ? »[2]
Qu'est-ce que la musique ? Quelle est votre définition de la musique ? Quels sont les éléments constitutifs d'une musique ? Quelles sont vos musiques préférées ? Pourquoi sont-elles si belles ?
Ecoutez un morceau que vous adorez. Observez ce qui se passe en vous. Quels sentiments ? Quelles images ? Quel plaisir face à telle sonorité, tel rythme, telle composition ? Qu’est-ce qui fait de ce morceau préféré un morceau proprement génial pour vous ?
Pourriez-vous danser sur une musique qui ne vous plaît pas ? Pourquoi ?
Pourriez-vous écrire vos réponses à toutes ces questions et les offrir en lecture à un ami qui aurait fait de même ? Ensemble, vous constaterez les similarités et les différences. Gardez-vous de tout jugement inutile ou de hiérarchiser, la techno n’est pas supérieure à la pop qui elle-même n’est pas inférieure à la musique baroque ou irlandaise.
Voici 2 courts morceaux de musique. Ecoutez et notez tout ce que vous entendez. [Sélectionner 2 morceaux brefs à écouter entièrement]
“Little Stars”, Rafael Toral [1:54]
Une musique peut donner envie de danser. Une autre, pas. Essayons deux styles très différents. Dans les deux cas, désolée, il vous faudra danser jusqu’à la fin du morceau. Courage. Il y aura un temps pour vous poser ensuite et écrire ce qui s’est passé.
Dean Town, Vulfpeck [3 :33], Having a Bath, H Hunt [3 :56], I Eet, Bremer, Mc Coy [3:54]
Prenez un temps en silence pour écrire vos réponses aux questions suivantes : Qu’est-ce qui vous a porté-e dans le premier morceau ? Et dans le second ? S’agit-il des mêmes ingrédients ? Même réflexions pour les éléments qui vous ont mis à l’épreuve ou qui vous ont bloqués.
Echangez avec un partenaire votre vécu. Ensemble, choisissez de porter à la connaissance du groupe ce qui ressort du croisement de vos expériences et interprétations.
Sharing circle.
Pour le morceau suivant, je vous invite à vous focaliser sur un seul élément constitutif de la musique : un instrument, une hauteur de sons, une rythmique. Tentez, dans votre solo, d'établir une relation harmonieuse avec cet élément. Soyez avec lui. S’il devient silencieux ou se défait, votre mouvement suivra aussi cela. Ne sautez pas sur le premier instrument ou première sonorité. Ecoutez un peu le début du morceau puis, choisissez et suivez.
“Little Stars”, Rafael Toral [2:00], “Boa”, Sam Gendel [5:48]
1. Prenons le rythme. Dans le morceau suivant, je vous demanderai d'être tantôt sur le rythme, tantôt en dehors de ce rythme. « A », Rafael Toral [4 :10]
◦ Que se passe-t-il quand vous êtes sur le rythme ? Comment était votre danse ?
◦ Que se passe-t-il quand vous dansiez hors du rythme ? Comment était votre danse ?
◦ A présent, nous allons passer l'un après l'autre sur la scène pour improviser ce type de danse (sur ou en dehors du rythme). J'ai choisi des morceaux relativement populaires pour votre confort. [A sélectionner justement !]
2. Voici une musique avec un instrument qui mène. C'est votre solo. Suivez l'instrument qui mène. Attention : ne démarrez pas votre danse tant que vous ne l'avez pas repéré.
« It never entered my mind » – Miles Davis [5:23] (la trompette n'arrive q'une minute après l'intro au piano)
« A Love Supreme IV – Psalm”, John Coltrane [7:02]
3. Voici trois musiques particulières. Composez avec elles : décidez d'être avec elles ou de les ignorez. Décidez d'en faire autre chose. Je vous préviens : c'est un corps à corps. C'est une lutte. Ne caressez pas la musique dans le sens du poil. Etablissez une relation avec elle. Si vous vous sentez perdu à certains moments, sortez de la scène est regardez avec moi ce qui se passe. Retournez sur scène quand c'est plus clair.
« A love Supreme Pt3 Pursuance », John Coltrane [10 :42] (batterie solo d'une minute suivi du sax et du piano solo)
“Valentine My Funny” , N.S. Blumm, Nils Frahm [7:15]
Les exercices précédents peuvent être travaillés avec une écoute particulière de la musicalité du corps en mouvement.
1. Démarrez un solo en silence.
2. Vos mouvements sont des notes, des silences, des rythmes. Notez cela.
3. Pouvez-vous identifier une mélodie ou un rythme ? Ou les deux à la fois ?
4. Certains mouvements sont proches du silence, d'autres sont plus sonores. Il est possible d'augmenter ou de diminuer le volume sonore de votre musicalité. Notez cela.
5. Prenez le temps de composer les mouvements de cette musique. Répétez-les pour obtenir une phrase.
6. Prenez le temps de composer la musique de ces mouvements.
7. Ecoutez-vous.
8. Je vais lancer la lecture d'une musique enregistrée. Ne réagissez pas. Ne vous adaptez pas. Maintenez coûte que coûte votre solo. Ne prêtez aucune attention à cette musique. Restez concentré sur votre solo.
Il s’agit de suivre la musique. Votre attention se focalise sur l’aspect percussif. Si vous ne trouvez rien de percussif, imaginez une percussion, quelque part, dans la musique, ou en vous. Percutez-vous.
« Late Moon », Dave Liebman, Adam Rudolph (musique syncope imprévisible, fracas)
Ø Comment vos os réagissent ?
Ø Comment vos ligaments répondent ?
Ø Comment circulent les liquides ?
“Threads: II. Recitative”, Paul Lansky [2 :00] , “Threads : VII. Aria”, Paul Lansky (Vibraphones) [3:40]
• Improvisation sur un discours en dansant uniquement quand la personne parle / pendant les silence
• Improvisation libre sur un discours. Après votre expérience individuelle, essayons une improvisation collective. Il n'y a aucune règle.
• Successions de solos, de duos, et de trios, de manière aléatoire sur Robert Ashley – The Park [21 :43]
• Echos et chœurs sont parfaitement synchro : Groupe 1 danse le premier chœur, groupe 2 le second chœur. Le second chœur semble répondre au chœur. Robert Ashley – A place in the Country (scene 17) [3 :06]
1. Il y a deux espaces dans la salle : l’un pour danser, l’autre pour observer la danse. Vous pouvez transiter d’un espace à l’autre.
2. Je vais vous donner un mot d’ordre quant à l’ambiance de vos mouvements. Essayez de coller au maximum à ce mot d’ordre.
3. Si vous éprouvez une difficulté mais que vous voulez rester de la partie, faites une pause. Immobilisez-vous tranquillement là où vous êtes, peu importe ce qui se passe autour de vous. Cette pause peut durer une seconde ou plus longtemps. Quand c'est de nouveau plus clair pour vous, reprenez votre danse.
4. A n'importe quel moment et sur base d'une décision claire, vous pouvez vous désengager et quitter l'espace de performance pour rejoindre l'espace du public et observer activement ce qui se passe. Quand vous sentez cela opportun et important, rejoignez de nouveau la performance.
5. Il est important de savoir s'arrêter quand ce n'est pas clair. Il est important de se sentir libre de se désengager. Quel que soit votre décision, il s'agit toujours d'une participation.
6. Nous allons donc nous confronter à des musiques avec, pour mots d'ordre :
a. Lenteur: « Melody Day », Fourtet Remix ;
b. Rapidité: “Tortuga”, Trigg & Gusset [4:40]
c. Fluidité (rapide ou lente) : « Dissolve », Emptyset [2 :50]
7. Commentaires en groupe (ce qui a été vécu et ce qui a été vu)
On relance l’exercice mais la consigne vise une émotion :
8. Douceur : « Soil and Coil », Raime.
9. Violence : « Blues N°2 », Loren Connors ; « 1382 Wycliff… », Akira Rabelais
10. Doute: “In a Landscape”, John Cage; “The seasons: 6. Summer” – John Cage [3:36]
Challenge : maintenir une qualité de mouvement en considérant la différence marquée avec la musique. La musique n’est pas ignorée. Elle est tenue à distance par le jeu du contraste. Pendant l’exercice, quoiqu’il arrive, que je sois acteur ou spectateur, j’observe mon rapport à moi, à l’autre et considère l’ensemble.
Dernier exercice : Votre groupe est cohérent et résiste à la musique. Cela ne va pas durer. Dans moins d’une minute, l’un de vous va suivre la musique. Le groupe reste connecté malgré tout.
[1]Trisha Brown in HUYNH E. (1995). « Face à dos – Entretien avec Trisha Brown », Bruxelles, Nouvelles de Danse, N°23, p.7 .
[2]Id., p 10